Les Guerriers du Soleil Levant
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Rôle du samouraï

Je vais vous ouvrir les portes de mon monde; le monde des samouraï. Laissez-moi discourir sur mes analyses post mortem de l‘histoire du régime shogunal et vous faire découvrir le véritable rôle du «noble» guerrier samouraï.

Bien avant que le concept de samouraï existe, de riches propriétaires terriens engagèrent à leur solde des guerriers mercenaires afin de protéger leurs terres. Petit à petit, ses propriétaires en sont venus à faire la guerre entre eux afin d’élargir leurs possessions, leur emprise sur le territoire. La grandeur de leur fief leur conférait puissance et prestige. Cependant, plus le territoire possédé était vaste, plus il requérait un nombre important d’hommes pour le défendre. Les mercenaires prolifèrent et avec eux les guerres entre seigneurs.

L’empereur, malgré son origine «divine», ne pouvait rien pour contrer ces guerres intestines qui morcelaient son pays. L’armée impériale n’avait pas la force requise pour faire face à ces nombreuses petites légions qui se formaient aux quatre coins du Japon. En effet, au lieu d’avoir à affronter un seul grand ennemi, elle se trouvait encerclée d’une myriade de cellules hiérarchiquement organisées et indépendantes entre elles. Le pouvoir grandissant de ses «petits seigneurs» se transmis de père en fils. La tradition en vint donc à légitimer le système patrimonial qui s’était installé graduellement.

Les faveurs qui étaient accordées aux membres de la parenté instaurèrent un complexe réseau de privilèges-redevances à l’intérieur de ses «provinces en devenir». Ce système mena à l’émergence de clans distincts. Ces seigneurs, légitimés par le règne du sang, en vinrent à convaincre la population que leurs intérêts personnels étaient en fait ceux du clan tout entier. Sous divers prétextes (insultes, trahisons, honneur) les guerres expansionnistes se multiplièrent. Les plus forts annexaient les plus faibles et les entraînaient à leur suite, augmentant sans cesse leur pouvoir.

Réalisant qu’une puissance parallèle rivalisait à la sienne et que la segmentation territoriale était une menace constante, l’empereur en vint, sous la pression de cette force militaire croissante, à confier au plus puissant des seigneurs le titre de shogun. En nommant ce chef de guerre, il espérait maintenir la cohésion dans son royaume. Cependant, ce pouvoir coercitif, au lieu d’assurer la stabilité de sa position, en vint à scier la branche sur laquelle il siégeait.

Cette nomination créa une nouvelle caste. Le shogun, nommé par l’empereur, ainsi que toute la cohorte militaire sous ses ordres, trouva de cette manière sa raison d’être. Par décret impérial, cette nouvelle caste (les Bushi) se vit insuffler une parcelle de l’essence divine, interdisant désormais toute contestation de cette noblesse militaire. L’empereur venait de creuser sa propre tombe. Les titres de daimyo et de samouraï apparurent à la suite de la naissance du shoguna. L’empereur se vit graduellement évincer de tout pouvoir politique, ne devenant plus qu’un symbole, une parure sur laquelle le shoguna s’appuyait, trouvant ainsi sa pierre angulaire. Le shogun était désormais le nouveau détenteur du pouvoir, régnant en roi et maître sur le Japon. Réalisant la puissance de ce nouveau propriétaire, les daimyo en vinrent à ce faire la guerre, avec leurs samouraï, espérant atteindre le titre de shogun.

S’appuyant sur les multiples préceptes puisés à même les diverses religions chères à la caste dirigeante, le bushido prit alors son essor. Les liens d’interdépendances qui unissaient les vassaux aux suzerains, jadis uniquement économiques (mercenaires), prirent alors une profondeur spirituelle démesurée. Les dirigeants intégrèrent leurs lois personnelles au bushido afin que celles-ci se muent en concepts moraux intériorisés par les samouraï. Complètement endoctrinés par ce code d’honneur complexe, les samouraï en vinrent à être convaincus que leur loyauté se devait d’être poussée à l’extrême.

Toute remise en question du pouvoir établit était passible de la peine de mort. Ce qui, au début, n’était qu’un châtiment réservé aux opposants du pouvoir, devint, avec le code, une action volontaire. Ce suicide se ritualisa et fut nommé Seppuku, pratique glorifiée par l’élite. Cette conception rigide de l’honneur, qui transcendait désormais les limites de la mort, constituait une assisse puissante des dirigeants; tout samouraï récalcitrant étant rapidement éliminé. Le peuple qui assistait à cette «exécution» publique comprenait la dévotion du guerrier. Cette compréhension contribueait à lui instaurer la peur des samouraï. De plus, le peuple était conscient du droit de vie ou de mort que le samouraï possédait sur lui. Ces deux éléments combinés faisaient en sorte que le paysan avait doublement intérêt à se soumettre à l’autorité de cette caste guerrière. La crainte était au peuple ce que la dévotion était au samouraï. Sous la crainte de la mort; crainte qui n’était pas partagée par les «supérieurs», la population n’avait d’autres choix que de ramper docilement et de se plier à la volonté de ses guerriers fanatiques, désignés comme forces de l’ordre officiel.

Le schéma suivit à l’intérieur de ce système militaire, était transposé sur la population; la crainte remplaçant la ferveur fanatique. Dans cette pyramide, chaque élément possédait le droit de mort sur les échelons qui lui étaient inférieurs. Cette hiérarchie sociale aboutissant en dernier lieu sur le peuple; ce dernier étage ne possédait que le droit de servir. Et nous, pauvres samouraï naïfs, nous étions les esclaves libres de leurs chaînes. Tout d’abord, nous avions donné notre sang pour que nos maîtres acquièrent leurs royaumes, ensuite nous leur avons permis, de par notre servitude volontaire, de conserver ce que leur tyrannie leur avait rapporté. Et moi, Yoshitsun Mishima, réalise par delà les frontières de la mort, à quel point nous n’étions que de simples outils pour nos maîtres

 
© Nicolas Mucci 2002 [ Haut ]